Un peu d'histoire

Morval


Morval, village de 96 habitants, se niche entre 4 communes de la Somme comme une presqu’île du Pas-de-Calais tout au bout du canton de Bapaume.

Avant 1914, il comptait de 220 à 250 habitants mais il fut complètement rasé lors de la grande guerre (1914-18).
L’église reconstruite était la réplique presque exacte dans le style, l’allure, et les proportions (45 mètres de hauteur, 40 mètres de long), que la précédente. Elle tenait aussi au fait que son clocher abritait 3 jolies cloches ce qui est plutôt rare pour un petit village. Elle fut inaugurée en octobre 1932.

Malheureusement, ce n’était pas de la bonne reconstruction et, dès les lendemains de la 2e guerre mondiale il fallut réparer la toiture, colmater des brèches autour du clocher, remplacer des vitraux, etc. Bientôt les municipalités successives furent incapables de faire face aux dégradations.
Une rénovation complète eut exigé, au minimum 1 500 000 francs alors que le budget annuel de la commune n’est que de 120 000 francs.

En novembre 1973, lors d’un enterrement, une partie du carrelage s’effondra au cours de l’offrande. L’édifice menaçant la sécurité fut fermé au culte et c’est la mort dans l’âme que le maire, les adjoints, les conseillers, les administrés décidèrent en 1985 sa destruction pure et simple. Une somme de 66000 francs fut réservée pour cette bien triste opération soulagée par une subvention de 25 obtenue du conseil général.
L’entrepreneur, M. Boniface d’Equancourt (Somme), profitant d’une belle arrière saison descendit les cloches le 21 septembre 1987. La grosse (800kg) faillit même le blesser.

L’artificier, M. Dromard, du centre national CEFICEM de Besançon (Doubs), n’avait jamais eu à effectuer pareille besogne. Il dynamita d’abord l’abside et le transept en y forant 600 trous. Les préparatifs furent plus longs que prévus en raison de la dureté des briques et du béton. Le 24 septembre à 19 heures, le clocher de 45 mètres si orgueilleux mais si coûteux d’entretien, s’abattit dans un nuage de poussière accumulée durant 55 années.

Des éclats projetés dans toutes les directions volèrent jusqu'à 100 mètres. Une brique fut retrouvée dans la cuisine du logement d’école : elle était passée par la fenêtre ouverte. Une maisonnette proche eut des vitres brisées malgré les volets fermés et la présence d’un véhicule faisant écran. La toiture de la grange de la ferme voisine fut passée au crible et dans un angle pourtant réduit où se tenaient des photographes, il y eut deux blessés légers atteints aux jambes sans parler d’un pare-brise de voiture cassé.

L’artificier montra après coup des briques lourdes d’eau absorbée au fil des ans et qui, sous l’action de nouvelles fortes gelées hivernales, risquaient d’éclater et de dégrader plus encore le clocher.

Les regrets douloureux s’exhalèrent après coup prolongeant longuement l’onde de choc ! C’était la première église d’après 14-18 qu’un village d’Artois était contraint de rayer de son paysage sans espoir de retour.

C’est un peu de son âme qu’on arrachait à notre pauvre localité qui ne serait plus jamais comme les autres !

Lorsque les décombres furent déblayés, cette grande place vide restait comme une plaie au cœur des habitants. La municipalité fit donc édifier trois ans plus tard ce petit campanile où l’on accrocha les trois cloches descendues avant la démolition. Parrainées par des habitants des années 30, elles restent bien vivantes et sonnent encore à l’occasion de chaque événement heureux ou malheureux comme on le faisait jadis.

Grâce à elles, Morval n’oublie pas son clocher disparu !